jeudi 13 septembre 2018

Eminem - Kamikaze [Chronique]


Comme Rohff, reboosté comme jamais pour kick de nouveau en studio. Qui pouvait me faire sortir de ma grotte ? Qui pouvait me donner l'envie d'avoir envie de revenir tapoter frénétiquement sur ce clavier pour partager le feu sacré de la passion.

Eminem,

Marshall Mathers,

Slim Shady,

Le seul, l'unique. Le plus sombre des rappeurs blancs illumine un Rap Game qui se complaît à briller sans panache.
Ayant mal vécu le flop de son dernier opus, Eminem nous revient tel un Kamikaze (dont la cover trouve son inspiration sur celle des Beasties Boys Licensed to III). Dans le vif du sujet, soyons clair, sans être une bouse du niveau de Relapse, Revival restera controversé dans le sens où il faut comprendre l'oeuvre du rappeur de Détroit comme une grande psychothérapie; son approche plus mélodique a une cohérence et une certaine fraîcheur pouvant laisser perplexe tout "stan" frileux aux changements.

En ce mois de septembre, "Marshall Ben Laden" explose les tours de la suffisance d'une critique qui ne digère toujours pas que la meilleure plume du jeu soit un homme blanc (Lord Jamar, Charlamagne tha God) pour ne pas les citer. It doesn't matter c'est la compétition dans le sang, porté par l'esprit de ceux qui ont pavé la route que la quasi totalité des rappeurs en vogue finissent sur le Death Note de l'ex blondinet.

Cet attentat salvateur aurait il été prémédité ? C'est en amont single après single que l'artificier de Detroit posa les bases qui font de ce nouvel album un succès explosif dans les charts. Sur le titre 'Catterpillar' en compagnie du gars sur Royce Da 5 9, il rappait s'adressant aux jeunes loups du rap: 

"Stampin" out Grasshoppers, you can't be no Rap Gods...You make a wack song song, and can't hold a candle" suivi du fameux "The boombap is back with an axe to Mumble Rap" 

sonnant comme la promesse d'exposer à la lumière du jour ceux qui selon sa vision font reculer le Rap en marmonnant un amour sans précédent pour le même sirop qui a emporté Fredo Santana...

Depuis, Revival la question légitime que l'on peut se poser c'est : qu'est ce qu'un rappeur auto proclamé Dieu du Rap peut encore raconter ? Tapotant sur les touches de mon bon clavier Logitech, Eminem est en ce moment même la cible récurrente du commentateur one hit wonder Joe Budden sorte de Christophe Dugarry du Rap (sans la Coupe du monde) c'est dire la légitimité en mousse; suivi de Lord Jamar cité plus haut, vétéran des Brand Nubian qui na que sa couleur de peau comme argument et dernier et pas des moindres : Machine Gun Kelly , rappeur ayant remis Cleveland sur la carte semblant amer de ne pas percer plus haut sur l'échiquier des rappeurs blancs.

Tous ont en commun ce procès en illégitimité asséné comme une sentence irrévocable renvoyant les artistes à l'hospice passé 40 ans. Une fois n'est pas coutume si vous laissez les autres parler à votre place n'attendez pas d’être au firmament des attentions.

L'adversité, la rage, la quête du respect et enfin  le soucis de l'héritage donnent corps à ce LP sorti des tripes. Construction exemplaire (skit hilarant du manager Rosenberg compris) sur les 13 morceaux, s’enchaînant comme une volée de direct en plein visage; qu'il est triste en revanche de devoir rappeler aux esprits chagrins la contribution du leader du D12 sur l'ensemble du Hip-Hop. 

Si je ne partage pas totalement sa haine du mumble Rap; quand un Lil Yachty ou un Lil Xan manque de respect à ceux qui ont posé les bases je conçois en revanche l'insulte et le ressentiment que peuvent ressentir des vétérans tel que Nas, le premier à avoir proclamé 'Hip Hop is Dead' quand la Dirty South occupait l'espace ou Jay-Z et son 'Death of Autotune'.  Avec un peu de mémoire on se souvient de KRS One crachant son fiel sur Nelly le balafré et si on creuse encore un type comme Common affirmait déjà que la scène WestCoast était une insulte au Rap sur le classique 'I Used To Love H.E.R'. Dans la droite ligne de la querelle entre anciens et modernes, chaque époque prédit la mort du Rap. Par conséquent, faut il devenir un vieux con pour recadrer un ptit con ? La sagesse de celui qui a de la mémoire serait de prendre la chose avec finesse comme le font Snoop et 50 Cent qui n'ont aucun mal à donner une chance à la nouvelle génération, malgré une opinion partagée qui ne manque pas de piquant.


Dans la continuité du Freestyle anti Trump lors des BET Awards, le Slim Shady prend soin de tracer une nouvelle ligne de séparation franche, prenant le risque de réduire sa fanbase comme il l'explique avec lucidité sur 'Fall' et 'The Ringer', le Rap God envoie de la force aux Kendrick, Hopsin, Logic et Big Sean et a su s'entourer sans s'encombrer pour prêcher sa bonne parole, entre autre Mike Will Made it, Boi-1da à la prod. Sans crier gare, la pépite 'Lucky You' en feat avec le trop rare Joyner Lucas vaut toute les réponses du monde si MGK et cie en réclame une au hasard.


L'une des grandes forces de l'album étant de surfer sur les beats du moment tout en y apportant sa marque; comme le dirait Fabe : "jamais dans la tendance, toujours dans la bonne direction", on savoure le pied de nez. On y découvre au cours des 45 minutes, un Em versatile, enclin à changer de flow à l'envie, comme pour asseoir sa domination en s'appropriant avec dédain le "style" de ses jeunes rivaux. 

Dans l'ensemble, nous avons le retour de Dre en producteur exécutif, la certification AOP du Rap Game est encore un gage de qualité non négligeable en 2018 et pour le coup Kamikaze s'en sort indemne tant il parvient à éviter le piège du fameux Clapback album, un comble. Dans une certaine mesure il me fait l’effet du 7 Theory de Makaveli tant chaque mesures est pensé et pesé pour faire du mal ou du bien selon votre position sur le terrain.

Eminem a t'il encore besoin du Slim Shady ? Peu importe au fond, la corde fébrile de Revival est bien loin, piqué au vif c'est le Marshall Matters nouveau qui nous est arrivé et il va encore falloir composer avec à l'avenir.

1 commentaire:

  1. Bel article. La punchline sur Joe Budden (Christophe Dugarry du rap,la coupe du monde en moins) m'a fait sourire.
    Honnêtement, j'ai vraiment du mal avec les instrumentaux actuels (mon côté vieux con sans doute) du coup j'ai dû un peu me forcer pour écouter cet album. Au niveau des lyrics, ça reste tout de même de bon niveau. Moi qui avait pratiquement lâché Eminem après Recovery (que j'avais trouvé plus décevant que Relapse), je me suis surpris à me repasser un de ses projets en boucle.

    BlackSco

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