Beyoncé (enfin) Pro Black ?
Le dernier clip de Beyoncé fait visiblement polémique au pays de l'oncle Sam. La femme de Jay-Z s'étant par le passé illustrer pour ses positions en faveur des droits des femmes ("Run The World"); la Queen B récidive cette fois ci en s'attirant les foudres des néo conservateurs et des Républicains pour avoir défendu la cause noire lors du Superbowl. En effet le titre "Formation" d'abord plébiscité sur la forme pour la qualité de sa vidéo et de ses décors, est devenu un sujet de débat pour son fond lors de la messe annuel des beaufs amateurs de foot US.
Désormais châtié par une partie de l'opinion public à l'heure où les États Unis célébrait il y a peu la mémoire de Martin Luther King Jr et d'autres activistes des droits civiques. Comment et pourquoi une chanson politisé en cette période conformiste provoque une si grande passion reste la véritable interrogation qui se pose derrière ce lever de bouclier ? Hilarant de constater avec humour qu'une partie de l’Amérique blanche découvre avec effarement que la très corporate Miss Knowles Carter est une Femme NOIRE avec un minimum de conviction et d’empathie pour ceux qui partagent sa couleur de peau.
Le Jour ou Beyoncé est devenue Noire
Avant elle, ce sont quelques rappeurs comme J.Cole ou Kendrick Lamar qui ce sont le plus souvent manifesté pour dénoncer les différends cas récents de violence policières. Les plus médiatisés ont fait le tour du web et des réseaux sociaux, ainsi les noms Traywon Martin, Tamir Rice, Micheal Brown, Eric Gardner, Messy Mya sont dans certains esprit des hashtag vite oubliés pour d'autre des symboles persistants prouvant que quelque chose ne tourne pas rond concernant la question noire aux USA en particulier.
Si on doit - malheureusement à notre époque - toujours s’interroger brièvement sur la spontanéité et la sincérité de la démarche d'une star comme Beyoncé; surtout quand celle ci fait suite à la polémique des Oscars 2016 où de grands noms du cinéma ont boycotté la cérémonie en signe de protestation sur le manque d'acteurs noirs. Il est utile de comprendre que rien n'est fait au hasard au pays d'Obama et dans le show business en général, la Pop Music fonctionnant sur une logique de renouvellement perpétuel. Il ne faut pas s'attendre à ce que Beyoncé devienne une nouvelle Angela Davis, la condition sine qua non pour durer dans l'industrie impose qu'une Pop Star ait toujours une "nouvelle histoire" à raconter au public.
En outre, la logique du buzz évacuer, "Formation" reste un manifeste sincèrement bien écrit dénonçant les injustices faites à la communauté afro-américaine comme le traitement de l'ouragan Katrina, les violences et l'impunité policière et surtout le crime ultime pour une Amérique conservatrice et puritaine : la valorisation du Black Power. Le Black Power doctrine s'inscrivant dans une logique de lutte des classes hérité des Black Panther puis passé de mode au fil du temps pour diverses raisons socio-politique et culturelles est avant toute chose une prise de conscience de l'identité culturelle et politique des citoyens noires aux États Unis. Si les communautés sont admises outre atlantique (ce qui n'est pas le cas officiellement en France) c'est surtout parce-qu’il existe une conscience larvée dans la société américaine qui classe les concitoyens en fonction de leurs origines ethniques et géographiques, c'est par ce biais qu'une politique des quotas est appliquée depuis des années dans divers domaines (entreprise, culture, sports) créant des sous divisions au sein même des minorités. Comprenons que c'est par cet habile stratagème que l'on peut miner de l’intérieur toute revendication politique tel que le Black Power désormais concrétisé par le Panafricanisme.
Il faut comprendre que le mondialisme comme Soft Power ultime véhiculant le fameux "Rêve Américain" et l'American Way of Life" à l'échelle de la planète na eu de cesse depuis les années 80 de nous convaincre que la lutte des classes était un sujet dépassé. La cause des noirs devant dorénavant lutter pour sa survie et sa légitimité dans une concurrence victimaire contre d'autres causes tout aussi louable et diverses (Ecologie, LGBT, Avortement, Féminisme etc). Comprenez l'ironie voulant qu'une partie du public séduit par le féminisme revendiqué de Single Ladies, se sentent dérouté en découvrant une nouvelle lutte dans la lutte ? Dans une époque ou une info en chasse une autre, l'idée même que l'on puisse être et penser plusieurs choses à la fois en dépasse plus que l'on imagine.
Formation Sous Titré Fr
Et Beyoncé dans tout ça ? Au delà du marketing, le couple qu'elle forme avec Jay-Z est reconnu pour sa proximité avec les Five Percent Nation, organisation suprémaciste noire qui possède ses antennes dans le Rap US depuis ses débuts. Bien consciente que si elle n'était pas devenue riche et célèbre notre cher diva pourrait tout aussi bien se retrouver abattue en pleine rue par des policiers intouchables. Quoique la célébrité ne protège pas de tout (le film Collision à voir). C'est d'ailleurs l'ex maire de New York Giuliani qui est monté au créneau pour défendre la police et le caractère sacré du SuperBowl (sic) motivant pour l'occasion des appels aux boycott et des manifestations contre la diva.
Le problème est pourtant des plus visibles, dans la mesure où la polémique renforce le fait qu'une partie de la population aveuglé par la démocratie de marché - ou plus clairement: la "liberté" du citoyen se résumant à ce qu'il consomme inlassablement ce qu'il se tue à produire - a oublié que la culture noire était bien vivante et qu'elle lutte à l’intérieur d'une lutte des classes plus actuelle que jamais pour sa visibilité. A la différence des autres communautés noires éparpillés à travers le monde, la communauté afro américaine tente de s'organiser pour son autonomie et son indépendance..
Le seul tord de Beyoncé a été de dire qu'elle était fière de ses origines, fière de sa culture, de sa peau et surtout que la vie des jeunes noirs compte (#BlackLivesMatters / #BlackPantherPBS). Il faut savoir historiquement que l'Etat profond US et le FBI via Hoover (ancien dirigeant de 1935 à 1972) ont toujours œuvré à la déstabilisation des communautés quelles soient noires ou hispanique (à lire ici).
L'émancipation met fin à l'exploitation, ceux qui iront manifesté contre Beyoncé sont ceux qui ont tout intérêt à défendre un système qui soumet et hiérarchise les cultures. Révélatrice de certains maux dans les sociétés occidentales, cette "affaire" dépasse les clivages Noirs/Blancs et nous interroge tous sur notre rapport à la question de l'identité. Pour le moment, il faudra s'y faire, Beyoncé est officiellement noire (jusqu'au prochain album au moins). Autant s'attendre qu'elle s'attire les foudres des conducteurs de 4x4 quand elle s'attaquera à l'écologie. En attendant, on lève le poing et on apprécie.
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