Kaaris - Or Noir [Chronique]

"Tellement mauvais que ça en devient bon"

C'est un peu la manière la plus simple de résumer le premier album de Kaaris: Or noir. Kaaris c'est un "jeune rappeur" (il perce en 2013) originaire de Sevran (93) qui s'est fait connaître du grand public sur "Kalash" en feat avec Booba. Fort du buzz générer par l'excellent couplet, c'est avec une certaine ferveur que le premier projet du rappeur était attendu des suiveurs.

"Putain Kaaris c'est trop Lourd" Ok, mais pourquoi ce buzz ?

Le succès du rappeur de Sevran s'explique par la géniale transposition du style trap de Chicago à notre rap game hexagonal. Du coup, c'est à coup de sons heavy et un flow saccadé que le emcee nous embarque dans son univers ou se mêle violence et revanche.

Si le flow particulier du K double A peut hérissé le poil de l'ex puriste que je suis, force est de constater qu'il est difficile de résister musicalement au délire proposé. L'egotrip est volontairement intimidant, délicieusement oppressant, peut être au point de friser la caricature certes, mais le délire est assumé. En effet, à l'image d'un Rick Ross dont personne n'ignore le passé de maton; l'univers stéréotypé de Kaaris parvient tout de même à nous embarquer le temps de faire croire à son public qu'il peut lui aussi rouler en Lexus alors qu'il roule en 206 (triste réalité n'est ce pas). Soyons clair, si vous pensez encore que les rappeurs sont de véritable gangster ou autre il serait temps d'élargir votre culture rapologique. Le Rap moderne est une industrie, l'industrie est là pour vendre du rêve et pousser à la consommation; en conséquence, l'album de Kaaris est là pour en tirer les bénéfices. Qui se soucie de savoir si notre rappeur trempe réellement ses cookies dans ses larmes ? Oui, dans le Rap Game moderne, on s'en balance complet. Est ce un mal ou un bien ? Vous êtes juges.

En définitive, Or Noir, n'a qu'une ambition louable. Celle de générer un maximum d'argent et d'assurer un train de vie confortable à son auteur. Pourtant, à l'image d'un Première Consultation de Doc Gyneco, qui avait à l'époque réussi la prouesse de convertir le son G-Funk à la sauce frenchy. Le premier album de Kaaris réussi un tour de force en ouvrant les valves du son qui a le vent en poupe dans les clubs US. Le tout avec une conversion quasi sans faute, au point où certains y voient un plagiat honteux, à l'image du single "Zoo" (lire ici) dans les textes et la gestuelle; la rançon de la gloire à mon humble avis.

Bien entendu, si on peut déplorer le manque de créativité artistique; une tare française qui voit nos rappeurs pompé sans vergogne le flow (lui même standardisé) des américains. Il faut y reconnaître une formule gagnante qui fait mouche et dont on aurait tort de se priver, tant elle fait le job quand il s'agit de mettre l'ambiance. A noter qu'en dépit du festival de rimes pauvres garnissant les tracks, une certaine plume pleine de référence à la pop culture et la communauté africaine sont à mettre au crédit de l'homme fort de Sevran. Sortons du dogmatisme puritain et sachons apprécier le Rap ou plus globalement LES raps. Or Noir, c'est une nouvelle forme de rap Hardcore et il a clairement sa place dans le Rap Game. Maintenant que l'on soit clair, Or Noir n'est pas un album que je pourrais écouter inlassablement. Et j'ai même peur qu'à l'avenir le style "trap" de Kaaris soit repris (sans talent) d'une manière tellement large, qu'il finirait à terme par soûler ceux qui l'encense aujourd'hui (suffit de voir le ras le bol que suscite l'auto tune).

Bref, en dépit de toute mes critiques, vous savez ce que dirais Kaaris au bout du compte ?

Et quelque part, il a bien raison. #MoneyFirst