Nous avons vu dans le précédent classement, comment le 11 septembre 2001 mettait un coup d’arrêt brutal à la composante contestataire du Rap US. Nous avons pu constater les prémices d'une nouvelle tendance où le beatmaker prend le pas sur le rappeur pour n’être réduit finalement à un statut d’interprète lambda rappant sur des productions génériques. Nous avons vu le Rap rentrer dans le rang sans vraiment nous en rendre compte et pour finalement culminer au Rap actuel. Mais avant d'arriver à ce stade.
En 2002 le Rap semble inconsciemment sentir le vent du changement et comme toute phase de transition il est intéressant d'observer une nouvelle fois vers quelle tendance le rap se dirige. Intéressant et aberrant de constater la lente descente aux enfers des rappeurs sur le chemin de la décrédibilisation. En 2002, le Hip-Hop est définitivement hype et tente de confirmer sa place en terme de valeur marchande dans l'industrie. 2002 c'est l'ère ou globalement chacun veut lancer sa marque de vêtement, la période où tout le monde se revendique (malheureusement) comme acteur, la période où le Rap est à mon sens à son plus bas niveau en terme de fond dans sa globalité. Soyons clair, l'industrialisation du Rap est une conséquence logique et naturelle. Tout art underground est voué à être récupérer afin d’être assimilé à la culture de masse : la Pop. Naïf sont ceux (dont moi même) qui ont cru que les racines noires et populaires du Hip-Hop nous préserverait d'une récupération par l'industrie. Foutaise ! Le Rap en dépit de sa profondeur unique n’échappe pas à l'ogre industriel. 2002 est le point culminant d'une logique ou le Rap mainstream tutoie les charts mais peine à convaincre une critique dorénavant plus tiraillé et partisane. C'est en l'époque ou The Source est de plus en plus remis en cause, l'époque ou des types comme Nelly ou Ja Rule, véritable synthèse de cette "Popétisation" (j'aime ce mot) à venir truster les sommets. Alors non le Rap porteur de messages fort et revendicatif n'est pas mort il est juste aphone à partir de 2002. Une autre forme de mort en somme.
En 2002 le Rap semble inconsciemment sentir le vent du changement et comme toute phase de transition il est intéressant d'observer une nouvelle fois vers quelle tendance le rap se dirige. Intéressant et aberrant de constater la lente descente aux enfers des rappeurs sur le chemin de la décrédibilisation. En 2002, le Hip-Hop est définitivement hype et tente de confirmer sa place en terme de valeur marchande dans l'industrie. 2002 c'est l'ère ou globalement chacun veut lancer sa marque de vêtement, la période où tout le monde se revendique (malheureusement) comme acteur, la période où le Rap est à mon sens à son plus bas niveau en terme de fond dans sa globalité. Soyons clair, l'industrialisation du Rap est une conséquence logique et naturelle. Tout art underground est voué à être récupérer afin d’être assimilé à la culture de masse : la Pop. Naïf sont ceux (dont moi même) qui ont cru que les racines noires et populaires du Hip-Hop nous préserverait d'une récupération par l'industrie. Foutaise ! Le Rap en dépit de sa profondeur unique n’échappe pas à l'ogre industriel. 2002 est le point culminant d'une logique ou le Rap mainstream tutoie les charts mais peine à convaincre une critique dorénavant plus tiraillé et partisane. C'est en l'époque ou The Source est de plus en plus remis en cause, l'époque ou des types comme Nelly ou Ja Rule, véritable synthèse de cette "Popétisation" (j'aime ce mot) à venir truster les sommets. Alors non le Rap porteur de messages fort et revendicatif n'est pas mort il est juste aphone à partir de 2002. Une autre forme de mort en somme.
Haut les cœurs cependant, l'année 2002 comprend son lot de bons albums. Ces rares albums sans avoir bouleversé et influencé l'industrie ne se contenteront de n’être que de très bons albums dans un océan de médiocrité. Une bien triste première, si bien que le salut pourrait (encore) venir de la scène underground et des néo-vétérans.
2002
10
Mr Lif - I Phantom
Le classement 2001 faisait état de l’effondrement de la résonance du rap militant et porteur de fond. Ainsi, si il faut saluer les efforts des artistes se voulant encore porteur d'un message, il est triste de constater que tout effort de contestation ou de revendication est un coup d'épée dans l'eau. Pire encore, le rappeur pouvant servir de porte voix n'arrive plus à se faire entendre malgré la pertinence et l'urgence du message. L'exemple le plus frappant est sans aucun doute le premier album I Phantom de Mr Lif. Album concept traitant du parcours difficile d'un travailleur immigré africain dans sa quête du rêve américain. Le tout étant ponctué par de joli tacle envers l'administration Bush. Une fois n'est pas coutume. (écouter un extrait)
9
RJD2 - Deadringer
Une fois n'est pas coutume, RJD2 ne parlera qu'aux auditeurs underground et amateur de rap alternatif. Avec Deadringer le producteur des Soul Positions propose une véritable maîtrise des samples Funk et Soul (Syl Johnson, Grover Washington Jr) pour un rendu trip-hop de qualité. La curiosité de ce classement. (écouter un extrait)
8
Blackalicious - Blazing Arrow
Le classement 99 vous faisait (re)découvrir Blackalicious et son excellent album NIA. En 2002, le duo originaire de San Francisco fait un retour attendu avec un Blazing Arrow d'excellente facture. Au menu des invités de renoms : monsieur Gil Scott Heron, Hi-Tek, Saul Williams en passant par Ben Harper. L'album se voulant porteur de messages positif envers la jeunesse, il permet surtout au emcee Gift of Gab de confirmer tout son talent de rimeur et de "punchline machine". So Underrated comme on dit. (écouter un extrait)
7
Devin The Dude - Just Tryin ta Live
Second album du nonchalant Devin The Dude. Just Tryin ta Live reprend la formule du premier album The Dude mais peaufine le tout par des invités de marques : Nas, Dr Dre, Xzibit, ou DJ Premier. On appréciera d'ailleurs l'effort des guest pour se fondre dans l'univers de Devin sans singer. En résulte l'album chill sans substance illicite (quoique) à écouter sans fin. (écouter un extrait)
6
GZA - Legend of the Liquid Sword
Qui est le plus fort du Wu Tang ? Meth, Ghostface, Raekwon sont les noms qui reviennent sans cesse. Pourtant parmi eux GZA (malgré un déficit de charisme comparer aux autres) n'en reste pas moins un des plus talentueux. Legend of the Liquid Sword se veut comme la suite du désormais classique Liquid Sword paru en 1995. Sans être un mauvais album, il ne parvient pas à faire revivre la magie du premier opus. Il parvient toutefois à se forger sa propre identité (plus moderne forcement) tout au long des pistes. Un album de qualité justifiant cette sixième place. (écouter un extrait)
5
Ei-P - Fantastic Damage
Dernière perle underground de ce classement. Fantastic Damage fait école en terme de Rap alternatif. Les samples sont parfaitement maîtrisés, les beats agressif comme rarement et surtout l'album fait la part belle au scratching (mon péché mignon). Totalement underrated par ce Rap Game manquant tellement de courage; le son d'Ei-P est prioritairement à mettre dans l'oreille des plus initiés et sensible aux genres. Sans quoi le risque de trouver l'album trop "élitiste" vous viendra directement à l'esprit. (écouter un extrait)
4
Eminem - The Eminem Show
En 2002, Eminem est au summum de sa popularité, au point il poussera le vice en jouant de son vivant dans son propre biopic. Une connerie génialement mégalo-narcissique qui donnera des idées à son futur poulain 50 Cent. Musicalement en 2002, bien qu'auréolé de succès Marshall doit encore se battre pour sa place dans le Rap et par effet domino il se retrouve en beef avec sa mère, Ja Rule, Benzino Jermaine Dupri et Mariah Carey... Son alter ego Slim Shady s'en prenant tour à tour aux stars du Showbiz et critiquant grassement l'américain moyen en l'invitant à se regarder en face. Bref, moins intimiste mais mieux écrit, moins pertinent mais plus agressif (le climat de beef aidant) on ne retrouve pas la magie des deux précédent albums (Dre étant plus en retrait) mais le tout est rattrapé par la performance époustouflante d'Eminem au micro et à quelques prise de risques bienvenues ("Sing for the Moment", "Hailie's Song"). Sans aucun doute son dernier bon album avant très longtemps. (écouter un extrait)
3
Talib Kweli - Quality
Si le rap contestataire et conscient a perdu sa force et sa résonance et plus tard sa crédibilité (voir classement 2001), il n'en reste pas moins pratiqué bien qu'ayant une portée plus faible dans ce monde tournant de plus en plus vite. Talib Kweli qui nous avait habitué jusqu'ici aux projets en duo se lance enfin en solo avec Quality. Album quasi classique avant sa sortie en raison du nombre de producteurs présent (Kanye, J Dilla, DJ Quik) et surtout par la crédibilité acquise au fil du temps. Quality se pose en totem d'une certaine forme d'un Rap authentique que seul les plus passionnés iront chercher. (écouter un extrait)
2
Scarface - The Fix
Scarface en 2002 est désormais un vétéran du Rap Game. Ayant côtoyé les meilleurs; il est un de ces artistes ayant contribué à mettre la jeune Southside sur l'échiquier du Rap Game. Le temps avançant c'est donc tout naturellement qu'il jouit du titre de King of the South. Pourtant, face au temps il fut bien aisé pour certain de décréter Brad Terrence Jordan de son vrai nom, totalement has been. Ainsi, c'est dans les pieds d'un vétéran que sort The Fix; histoire de remettre les pendules à l'heure et prendre une leçon d'écriture et de récit street. Autre tendance qui confirme donc ce que j'analysai pour le classement 2001. The Fix est l'occasion de voir une pléthore de producteur en vogue gravité autour du projet. Ainsi, l'incontournable Kanye West contribue à donner une nouvelle jeunesse à Scarface, tandis que les tout aussi expérimenté Nas et Jay-Z viennent consolider le tout sur "In Between Us" et "Guess Who's Back". (écouter un extrait)
And the Winner is
1
Nas - God's Son
Suite à son beef facilement remporté face à Jay-Z. Nasty Nas est désormais le meilleur rappeur de la grosse pomme. Fort de son titre de "King of New York", fraîchement acquis la continuité voulait que Nas confirme son statut avec un album digne de ce nom. God's Son est donc le sixième album du rappeur du Queensbridge et il renoue avec brio avec cette plume incisive et son sens des images. Pourtant, la terrible et bouleversante anecdote autour de God's Son nous touche lorsque l'on sait que la mère de Nas décède peu de temps avant l'entrée en studio de l'artiste. Ce triste coup du sort est donc l'occasion de découvrir une nouvelle facette plus personnel du rappeur à travers ses textes. L'occasion pour lui d'aborder des thèmes touchant au politico-social, à son statut dans le Rap Game et surtout son envie d'espoir pour les générations futures. Vous savez, le Rap est une musique portant la lourde tache de "parler vrai". Par conséquent, l'auditeur attend du rappeur un langage de vérité et il arrive parfois que l'auditeur se sente trahi lorsqu'un artiste abandonne petit à petit son discours des débuts. Dans le cas de Nas, si il n'abandonne pas les hommages au Queens. Il parvient pour la première fois à passer du stade de rappeur purement street à un artiste tendant vers l'érudition. Et c'est bel et bien à partir de God's Son que se base le Nas actuel (qu'on tente bêtement de ramener à Illmatic). En hommage à peine voilé à sa mère défunte, Nasir Jones signe ici un de ses meilleurs albums à ce jour. (écouter un extrait)
Conclusion : En 2002, Papy fait de la resistance
Le Rap est cool. Le Rap est tendance. Celle qui était encore une sous culture est désormais une culture de masse. Phénomène logique, l'année 2002 est révélatrice d'une tendance qui va se généraliser. Si dans les années 80/90 succès critique allait de paire avec succès commercial. La tendance nous montre qu'en 2002 il ne suffit plus d'avoir une énorme street crédibility pour être au top des chartz. A coté de ça, l'auditeur qui était jusqu'ici habitué à recevoir confortablement le "bon son" directement en radio va devoir faire l’effort d'aller chercher les travaux d'artistes se donnant à fond en studio. En opposition à un Rap de plus en plus "easy listenin" (facile à écouter), 2002 est une année de transition où Rap de fond lutte pour sa survie. Les rappeurs les plus malins (comme Nas, Outkast ou Eminem), sauront parfaitement faire le grand écart entre Street et Mainstream aidé par des producteurs de talents comme le déjà incontournable Kanye West. Mais pour combien de temps encore ?
j'aurais bien aimé voir phrenology des roots dans ce classement vu la qualité de l'opus
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